L'année scolaire se terminait et la ville du Mans bruissait des "24 heures" qui approchaient. La plus grande course automobile du monde n'avait pas eu lieu depuis 1939 et avait été ressuscitée en 1949.
De mon poste d'observation, je voyais beaucoup d'animation dans l'atelier d'en face car l'équipe GORDINI y avait élu domicile.A cette époque, les pilotes prenaient leur voiture de course pour un oui, pour un non. Il y avait une rampe et même deux, au garage. Les pilotes s'amusaient à monter et descendre ces rampes à toute vitesse. Vous ne pouvez pas imaginer le raffut dans le quartier ! C'était de la folie, pour un enfant d'à peine huit ans ! Ajoutez à ça que des particuliers enlevaient leur pot d'échappement et fonçaient à travers la ville comme des damnés, notamment autour de la place de la République qui devenait, pour une semaine, le rendez-vous des afficionados.
Le matin, pour me rendre à l'école, je passais devant un énorme bâtiment où il y avait quelques voitures de course rangées en file indienne. Je m'y suis faufilé sans me faire remarquer : c'était le "Pesage", l'endroit des vérifications techniques des voitures qui participaient à la course.Je me suis retrouvé devant une magnifique TALBOT bleue, la numéro 7, les roues étaient aussi grandes que moi...Tellement estomaqué par tant de beauté, par la puissance qui se dégageait de ce monstre que j'ai dit tout haut : "C'est celle-là qui gagnera, c'est sûr !". Le pilote, Meyrat, qui était propriétaire de la voiture, me regarda en souriant, il devait penser "les enfants ont toujours raison". En fait, il terminera second derrière une autre TALBOT, la numéro 5, celle de Rosier père et fils.